synonymie

nom féminin
(latin synonymia, du grec sunônumia) Relation qu'entretiennent entre eux divers termes ou expressions ayant le même sens ou un sens voisin.

LINGUISTIQUELe degré de ressemblanceLa synonymie désigne une relation lexicale d'équivalence ou d'identité dont il convient d'abord de cerner le statut sémiologique. Contraire de l'homonymie (où des signifiants identiques supportent des signifiés différents : palais : partie de la bouche et résidence princière), la synonymie désigne l'existence des signifiants différents qui renvoient à un signifié identique : cime / sommet ; dangereux / périlleux ; facile / aisé. Mais le caractère différentiel du signe au sein du système interdit toute synonymie absolue : la synonymie n'est toujours qu'un degré de ressemblance. Il y a donc au moins un point où deux signes doivent différer : un travail facile / un travail aisé ; une femme aisée / une femme facile.Comme on voit, le principe sémiologique implique immédiatement la nécessité de la différence. Alors pourquoi, aussi, la ressemblance ? C'est devant cette question que la linguistique recule. En effet, à se fonder sur le seul principe de substitution, une linguistique de la phrase ne peut justifier que les différences selon les contextes, ce qui s'amplifie encore si l'on prend en compte les niveaux de langue (littéraire, soutenu, familier, populaire, etc.). Un écrivain comme Queneau peut jouer systématiquement de ces différences – en témoignent ces deux exemples tirés du Chiendent : « Un vieux satyre ! Chaque fois qu'i peut, i m'pince les fesses. – Il en pince pour vous ! » et « Oui, Ernestine, je vous sors de la dèche, de la mouise, de la débine ! Je vous sors de la pauvreté, de la misère, de l'indigence ». Le statut de la nuanceLa rhétorique classique a bien tenté de mettre en avant le concept de répétition ; la variété ou la richesse synonymique devenait alors le propre de l'agrément, nécessaire aussi pour la persuasion. Reste que, logiquement, au nom du principe d'univocité, la synonymie n'est pas une relation nécessaire. Pour un logicien comme G. Frege, la synonymie manifeste que les langues naturelles sont défectueuses, voire dangereuses : « Les cas les plus dangereux sont ceux où les significations des mots diffèrent très peu, où les variations sont légères bien que non équivalentes. » (Écrits logiques et philosophiques.) Pour J. Cl. Chevalier (Langages, 24, 1971), « le synonyme n'est pas nécessaire quand on examine les principes et particulièrement le principe d'univocité mais il est nécessaire quand on considère que le langage est d'abord et avant tout un élément de la communication sociale, qu'il établit un échange entre les personnes ». Le travail rhétorique sur la synonymie a donc pour effet d'approfondir les différences : on cherche, comme l'abbé Girard par exemple (Synonymes français, leurs différentes significations et le choix qu'il faut en faire pour parler avec justesse, 1794), à donner un statut à la nuance, qui distingue.Ainsi, nulle part le principe de ressemblance n'est, comme tel, pris en compte : plus on accentue les différences, plus on croit justifier la synonymie ; mais du même coup le concept de synonymie perd toute validité : un bon dictionnaire des synonymes doit montrer qu'il n'y a, au vrai, nulle synonymie (c'est ce que fait le Nouveau Dictionnaire des synonymes de Génouvrier, Désirat et Hordé, qui prend en compte les différents paramètres des mots soumis à sa nomenclature). Parlant de ses « observations » sur les synonymes, l'abbé Girard explique : « Elles n'ont pour objet ni les règles de la grammaire, ni la pureté de l'usage ; mais uniquement la différence délicate des synonymes, c'est-à-dire, le caractère singulier de ces mots, qui, se ressemblant comme frères par une idée commune, sont néanmoins distingués l'un de l'autre par quelque idée accessoire et particulière à chacun d'eux ; d'où naît, dans beaucoup d'occasions, une nécessité de choix, pour les placer à propos et parler avec justesse ; qualité aussi rare qu'aimable, dont le goût est capable de faire briller le vrai et de donner de la solidité au brillant. » Et Girard note aussi, comme en passant, une autre possibilité, qu'il s'empresse de faire oublier au nom de l'« art d'écrire ». « Je ne disconviens pas qu'il n'y ait des occasions où il soit assez indifférent de choisir ; mais je soutiens qu'il y en a encore plus où ils ne doivent ni ne peuvent figurer l'un pour l'autre… C'est en quoi consiste l'art d'écrire. »Il est clair que le test de substitution est impuissant, à lui seul, à justifier la synonymie – ce que montre R. L. Wagner (les Vocabulaires français, 1967) : « Indépendamment du fait que la synonymie n'est jamais parfaite, la substitution est trompeuse parce qu'elle met en regard deux termes qui, en général, n'ont pas la même extension d'emploi soit du point de vue morphologique, soit du point de vue des constructions, soit du point de vue des collocations. » Cependant, en s'appuyant sur « le principe de consécutivité (F. de Saussure), on peut trouver quelque lumière. Il faut alors penser la synonymie dans une grammaire de texte, et en relation avec les autres moyens syntaxiques qui assurent la cohésion du texte par la répétition (D. Slakta, Sémiologie et grammaire de texte, 1980). On comprend alors et la recherche de la nuance (des propriétés « accessoires » peuvent être attribuées à l'objet) et le mécanisme de la métaphore : la métaphore se fonde sur la relation sémiologique de ressemblance et s'articule donc à la synonymie. « Le mot, note J. Gracq (En lisant, en écrivant, 1981), dont je guette avec patience le surgissement dans les parages d'un autre qui me sert d'appât lui est bien apparenté de quelque façon. Seulement il l'est plus souvent, hélas ! de la main gauche que l'autre… » Les dictionnaires ne connaissent que les unions légitimes, alors que « la langue vibre surtout dans ses compromissions adultères ».
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