anagramme

nom féminin
(grec anagramma, renversement de lettres) Mot formé en changeant de place les lettres d'un autre mot. (Une anagramme de gare est rage.)

RHÉTORIQUETraditionnellement, une anagramme (« c'est une faute assez commune de faire anagramme masculin », Littré) consiste à transposer les éléments composant un signe, les lettres d'un mot, pour produire un autre mot, une autre phrase ou un autre signe. Ainsi procède M. Leiris dans Glossaire j'y serre mes gloses (Mots sans mémoire, 1969) : baiser = braise ; cirque = crique ; nacre = carne. Souvent, dans l'histoire de la production littéraire, et pour des raisons diverses, l'anagramme prend pour départ un nom propre. Si le pseudonyme anagrammatique Alcofribas Nasier cache François Rabelais, un nom propre, un signe aussi peuvent dévoiler des significations que l'anagramme impose comme sous-jacentes : A. Breton épelle Avida dollars dans Salvador Dali. La littérature française du XVIe s. (à la suite du poète Dorat) a abondamment utilisé les ressources du procédé ; ainsi de la Délie de M. Scève, anagramme de l'Idée.Dans des cahiers inédits, commencés probablement en 1906 (cf. J. Starobinski, les Mots sous les mots, 1971), le linguiste genevois Ferdinand de Saussure a pensé établir que les anagrammes phoniques jouent un rôle déterminant (plus important même que la rime ou l'allitération) dans la production de certains discours poétiques (poésie homérique, poésie et prose latines, etc.). Le terme d'anagramme prend alors une acception nouvelle et obéit alors à des règles strictes : le plus souvent, un nom propre sous-jacent et jamais exprimé (ce peut être toute espèce de signe) est pris comme mot-thème (ou hypogramme), c'est-à-dire aussi comme « réserve de phonèmes » : les phonèmes ou les syllabes sont alors disséminés, mais reconnaissables, dans d'autres termes qu'ils appellent, de sorte que le mot-thème commande le choix des termes explicites et dirige le développement du texte. Si la dissémination s'opère dans « un petit espace comme celui d'un mot ou deux », Saussure parle d'anagramme, sinon, de paragramme. Ainsi, pour Saussure, dans le vers « Taurasia Cīsauna Samnio cēpit », se dissémine et se dissimule le mot-thème Scipion (Scīpio) : « Ceci est un vers anagrammatique, contenant complètement le nom de Scīpio : dans les syllabes cī + pi + io, en outre dans le S de Samnio cēpit qui est initial d'un groupe où presque tout le mot Scīpio revient. L'anagramme est ici un procédé de répétition (de phonèmes, de syllabes), en même temps que le texte se produit comme mimétique du mot-thème. » Diverses recherches (cf. Oulipo) ont tenté de pousser et d'élargir « la découverte » de Saussure jusqu'à des discours littéraires modernes et contemporains. J. Starobinski cite ainsi ces vers du Cimetière marin de Valéry : « La mer, la mer toujours recommencée ! / Ô récompense après une pensée... », où « le second vers est construit sur l'imitation phonique de recommencée ».→ rhétorique, figure
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